Existe-t-il un traitement pour les DIP ?
Les progrès de la génétique ont permis une meilleure compréhension des mécanismes moléculaires et donc une meilleure compréhension du système immunitaire normal. Ceci a permis aussi de progresser sur le plan des traitements.
Le traitement est fonction de la sévérité et de la nature du DIP
Certains enfants vont bénéficier simplement d’antibiotiques à visée de protection des infections et d’une surveillance en consultation alors que d’autres vont avoir besoin de traitements plus importants avec des injections régulières de médicaments (= substitution). Le plus fréquemment ce sont des injections d’anticorps (ou immunoglobulines) qui sont nécessaires quand le corps ne les produit plus en quantité suffisante. Ces 2 types de traitement (antibiotiques ou injections d’anticorps) sont les traitements les plus fréquemment rencontrés. Dans d’autres situations,
les enfants ne peuvent survivre sans un traitement encore plus lourd de type greffe de moelle ou thérapie génique.
La substitution
L’indication d’un traitement substitutif est sans équivoque dans les déficits les plus profonds de production d’anticorps, tels les agammaglo-bulinémies. Elle doit être discutée dans les déficits partiels en fonction de leur retentissement clinique.
Des traitements antibiotiques à visée anti- infectieuse, curatifs ou préventifs peuvent y être associés.
Ce traitement substitutif est composé d’anticorps appelés aussi immunoglobulines (Ig) humaines normales
(dites aussi « polyvalentes » car contenant une très grande variété d’Ig utiles contre des bactéries, des virus, etc…) qui proviennent du mélange de plasma de plusieurs milliers de donneurs de sang. Ces préparations vont subir différents procédés de purification et de sécurisation. Ces procédés répondent aux normes de sécurité virale exigées par l’agence française de sécurité sanitaire des produits de sante . Ces préparations permettent d’apporter principalement des IgG.
Le traitement substitutif se fait :
- en perfusion intraveineuse (IV) (toutes les 3 à 4 semaines souvent) à un débit adapté à la tolérance clinique (réactions indésirables souvent dépendantes du débit de perfusion et se résolvant lorsque celui-ci est diminué). Les premières perfusions doivent être, en principe, réalisées en milieu hospitalier (hôpital de jour le plus souvent).
- par voie sous-cutanée (SC) également, à raison d’une injection hebdomadaire, sur un ou 2 sites d’injection par voie sous-cutanée. Le but de la substitution est de prévenir la survenue d’infections sévères ou récurrentes en apportant à l’enfant des anticorps en quantité et qualité suffisantes.
Le pronostic vital et fonctionnel des enfants ayant un déficit primitif de l’immunité humorale dépend de la qualité du traitement substitutif. Correctement pris en charge, les enfants et patients adultes ont une qualité de vie améliorée, se traduisant notamment par une quasi-disparition des infections bronchiques et pulmonaires.
Les DIP étant des maladies chroniques, le traitement immunosubstitutif sera à ajuster tout au long de la vie et nécessitera des consultations répétées, voire des hospitalisations, en cas d’évènements intercurrents (pouvant survenir et s’ajouter). Leur prise en charge doit s’envisager sur plusieurs années, parfois à vie.
Une prise en charge pluridisciplinaire est souvent nécessaire : médecins de famille, médecins spécialistes, infirmières, kinésithérapeutes,…
La greffe de moelle
Certains enfants ne peuvent survivre sans un traitement lourd de type greffe de moelle ou thérapie génique. Les greffes de moelle osseuse, proposées pour les DIP les plus sévères constituent, en cas de réussite, un traitement curatif. Ces dernières années, elles ont considérablement amélioré le pronostic de ces maladies.
La thérapie génique
Quant à la thérapie génique, par transfert d’un gène sain capable de suppléer le gène défaillant, elle constitue l’espoir majeur pour guérir les enfants concernés par un DIP. Aujourd’hui, cependant, elle ne concerne encore que très peu d’enfants. Elles est réservée aux enfants pour lesquels la greffe de moelle va mettre leur vie en danger de manière plus importante.
Quels bénéfices attendre des traitements ?
Seules la greffe de moelle et la thérapie génique peuvent permettre de corriger de manière définitive le DIP. La thérapie génique n’en est encore qu’à ses débuts.
Le traitement immunosubstitutif ne permet pas de guérir le DIP, il ne fait que corriger de manière efficace un défaut de production de l’organisme. Il constitue néanmoins un traitement qui a fait ses preuves.
Pour tous les enfants atteints de DIP, tout sera mis en place pour qu’ils mènent une vie quasi-normale, avec un traitement, plus ou moins lourd selon le type de DIP.
Quelles sont les différentes modalités d’administration du traitement substitutif ?
Le traitement immunosubstitutif peut être administré à l’hôpital avec des perfusions intraveineuses toutes les 3 à 4 semaines.
Il existe aujourd’hui un cadre légal permettant son administration à domicile (voie IV ou sous- cutanée). Il a été démontré que le traitement
substitutif à domicile, était réalisable avec un confort supérieur et une efficacité équivalente aux perfusions à l’hôpital, chez des patients ayant un déficit immunitaire et dont la substitution en Ig avait été initiée en milieu hospitalier. L’avantage du domicile est de garder une vie sociale et familiale plus proche de celle que l’on souhaiterait.
Si l’état de santé de l’enfant l’autorise, la substitution peut se faire à domicile, au rythme d’une fois par semaine par voie sous-cutanée, ou toutes les 3 à 4 semaines en perfusion intraveineuse. Pour les 2 modalités (intraveineuse ou sous-cutanée), un temps d’apprentissage à l’hôpital est nécessaire, jusqu’à ce que le patient et son entourage soient prêts au retour à la maison, sans prendre de risque pour l’enfant. Des recommandations et des consignes sont données avant tout traitement à domicile, celui- ci se faisant lorsque parents et enfant s’y sentent « prêts ».
Comment se passe le traitement à domicile ?
Le passage à domicile est une décision prise en accord avec le médecin référent de l’enfant, le médecin traitant, l’équipe soignante et bien entendu la famille et l’enfant.
C’est une décision qui se prépare et se réfléchit, avec l’ensemble des acteurs.
- Un apprentissage est d’abord fait à l’hôpital où toutes les situations ui pourraient se présenter au domicile sont envisagées et prêtes à être résolues.
- Un livret sera remis avant le retour à domicile permettant de noter les ffets indésirables et/ou les difficultés rencontrées lors de chaque dministration. Les étiquettes qui figurent sur les flacons devront y être collées. En effet, ce carnet est un élément important pour effectuer la traçabilité des lots administrés, c’est-à-dire que chaque lot de médicament fabriqué est unique et le suivi de l’administration de ce lot est rendu possible grâce à ces étiquettes (elles contiennent le n° du lot et le nom du médicament) : c’est une sécurité. Il est indispensable de venir avec ce cahier à chaque consultation hospitalière. Une fois ce cahier terminé, avec les étiquettes collées, il sera gardé, soit à la pharmacie, soit dans le dossier médical.
Le traitement à domicile est-il aussi efficace qu’à l’ hôpital ?
Oui, les produits administrés sont identiques et ont la même efficacité.
Comment se passe le suivi de la maladie à l’ hôpital et à domicile ?
A l’hôpital, se déroulent les consultations avec les médecins spécialistes connaissant le mieux la maladie de votre enfant. Vous pouvez être amenés à y réaliser certains examens, soit en hospitalisation conventionnelle (quelques jours), soit en hospitalisation de jour (journée ou demi-journée).
Parfois, les traitements sont réalisés à l’hôpital et ne peuvent être administrés à domicile :
- en raison des effets secondaires du ou des médicaments,
- en raison de l’état de santé de votre enfant, qui tous deux nécessitent une surveillance médicale rapprochée.
Dès que cela est possible, tout est fait au plus proche de votre domicile, mais cela n’est pas toujours réalisable. Si votre enfant reçoit un traitement à domicile, c’est votre médecin qui déterminera le rythme des consultations (souvent tous les 3 à 6 mois). Dans le livret qui vous sera remis (cf paragraphe ci-dessus), vous pourrez inscrire, avec l’aide de l’équipe soignante, les coordonnées de toutes les personnes impliquées dans le traitement de votre enfant, que vous pouvez appeler en cas de difficultés.
Quelles sont les informations à connaître et à faire connaître en cas d’ urgence ?
En cas d’urgence, il convient de signaler le nom de la maladie (si on la connaît) et les médicaments que votre enfant reçoit. Il faut alerter rapidement le médecin référent de votre enfant ou les collègues de ce médecin qui sont susceptibles de connaître votre enfant.
Le mieux est de posséder un document expliquant la maladie ou un certificat du médecin référent expliquant les complications éventuelles et les traitements à réaliser en urgence.
Les DIP étant des maladies rares, vous rencontrerez parfois des professionnels de santé qui connaissent moins bien la maladie de votre enfant. Une carte de soins propre à chaque patient va bientôt être à la disposition des familles . Cette carte expliquera en quelques mots le DIP, le traitement habituellement suivi par le patient et les médecins à contacter en cas de besoin ainsi que les principaux conseils en cas d’urgence.
Peut-on se faire vacciner quand on a un dip ?
La vaccination d’un patient atteint d’un DIP reste une décision à prendre au cas par cas. Trop souvent, elle n’est pas prise en compte dans les approches réglementaires (entrée dans la vie professionnelle ou voyages).
Pour connaître la stratégie vaccinale la mieux adaptée à son DIP, il convient d’en discuter avec le médecin prenant en charge le DIP ou les centres de vaccination des CHU ou des centres spécialisés tels que l’Institut Pasteur.
Le CEREDIH met en place des recommandations pour la prise en charge des patients atteints de DIP, notamment pour les vaccinations.
Les immunoglobulines : un traitement vital, à vie !
Les immunoglobulines sont un médicament vital pour les patients atteints de certains DIP (avec défaut de production d’anticorps). Ces patients en ont besoin à vie.
Ce qu’il faut savoir sur les immunoglobulines (Ig)
Les Ig sont des médicaments dérivés du plasma (obtenus à partir de dons de sang, ou directement de dons de plasma). C’est un produit très élaboré et donc très coûteux (40-45 euros le g). Il n’est délivré qu’à l’hôpital, sur prescription - la première fois - d’un médecin spécialisé issu d’un centre de compétence du CEREDIH. Elles font l’objet d’une demande mondiale croissante conduisant à des tensions sur les approvisionnements, y compris en France. D’où des mesures de hiérarchisation prises régulièrement par les pouvoirs publics de santé, afin d’assurer la priorité de ce médicament aux patients dont la vie en dépend et pour lesquels il n’existe pas de médicament de remplacement. Les patients atteints de DIP sont prioritaires.
Il existe différentes préparations qui ne sont pas substituables entre elles, à la manière d’un générique, car chaque patient peut révéler une tolérance différente selon la préparation.
Les Ig existent en différentes concentrations et peuvent être administrées par deux voies : intraveineuses et sous-cutanées. Elles peuvent être administrées à l’hôpital, mais également à domicile.
La formation des patients est indispensable : une bonne compréhension du rôle des Ig (surtout quand ils vont bien) facilite l’acceptation de l’équilibre bénéfice-contrainte et garantit la sécurité de l’administration.
Intraveineuses (IV), sous-cutanées (SC) : Où en sommes-nous ?
Par le Dr Virginie Gandemer, responsable de l’unité d’hémato-onco pédiatrique du CHU de Rennes.
Cela fait plus de 5 ans que médecins et patients disposent d’immunoglobulines administrables par voie sous-cutanée en complément de celles qui existaient par voie intraveineuse. Une alternative qui a amplement facilité le traitement à domicile des patients.
Le moment du diagnostic et de la mise en route de la substitution est crucial pour les familles. Il s’agit d’améliorer les symptômes liés au déficit immunitaire, mais aussi de bien faire comprendre les contraintes du traitement. A Rennes, nous avons fait le choix de commencer systématiquement par un traitement par voie intraveineuse pour deux raisons :
- la première est médicale. Cela nous permet en effet d’atteindre rapidement le taux sérique protecteur.
- La seconde est plus éducative. La venue en hôpital de jour permet une bonne information sur la maladie, et aux parents de « digérer » les choses.
Cependant, dès le début, nous leur parlons des différentes possibilités de voie et de traitement à l’hôpital de jour ou au domicile.
Apprivoiser la maladie
Ensuite, nous modulons nos propositions pratiques en fonction de l’âge de l’enfant et de la compréhension de la famille pour envisager une sous-cutanée à domicile. De toute façon, rien n’est jamais fixé de façon définitive. Il n’y a pas de barrière d’âge ferme, mais en dessous de, disons 5-6 ans, on préfèrera un suivi en hôpital de jour et donc des perfusions mensuelles.
Nous avons peu initié de traitement IV à domicile. Pour les plus petits (et les moins expérimentés dans le suivi de la maladie), on préfère garder un lien avec le patient, être plus proche de lui. L’autre frein à notre utilisation de l’IV à domicile est local et plus ennuyeux médicalement : nous n’avons pas de structure d’Hospitalisation à Domicile (HAD) pour les enfants, et il est ainsi difficile dans la région d’organiser les perfusions à domicile.
Pour les plus grands, dès que l’on constate qu’ils ont bien compris, on favorise le recours aux sous-cutanées à domicile, parce que c’est plus pratique pour les familles, notamment en termes de déplacements, que leur couverture immunologique est bonne avec des doses moindres, ce qui représente un coût global gagnant. On garde une consultation à un mois et on regarde si cela se passe bien. Mais le préalable est que la famille ait bien compris et « apprivoisé » la maladie. A ce jour, nous n’avons observé aucun patient substitué par voie sous-cutanée qui veuille revenir aux IV. Que ce soit en termes de tolérance (dont la douleur aux points de ponction) et de risques, il n’y a aucune problématique particulière. En revanche, sur un délai de 3, voire de 5 semaines, il n’y a pas de problème à passer d’une substitution sous-cutanée à IV, le temps d’un séjour en vacances et, de plus en plus fréquemment, d’un stage, y compris à l’étranger.
Le seul bémol que j’ai constaté, est, qu’on ne voit plus assez souvent les patients. Ils sont devenus très autonomes. Certains ne viennent plus aux rendez-vous du centre de compétence, ils font les renouvellements dans leur centre hospitalier de proximité et négligent le suivi indispensable de leur maladie, même s’ils vont bien.